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Mon père disait parfois: « Dieu aime Bach car Bach est la preuve de l’existence de Dieu ». Il a sans doute un peu plagié Emil Cioran.
Je n’ai aucune idée de Dieu, mais j’aime Jean-Sébastien Bach (et tant d’autres) pour sa musique.
Certains diront que ça leur prend aux tripes.
Moi non.
Cette incroyable musique me déchire le cœur.
Non pour l’abîmer ou le heurter mais pour l’ouvrir à sa grandeur et à sa beauté.
Pour le pénétrer, comme quelque chose d’essentiel, à la fois infiniment intime et étroitement universel.
Elle me déchire le cœur par sa puissance.
Et lui, éternel amoureux, il lui cède, il s’incline à elle et commence à croître pour lui faire plus de place, pour tenter de l’accueillir pleinement, mais en vain.
Il voudrait presque se l’accaparer, ou en tout cas s’en nourrir le plus possible, comme d’une denrée précieuse et salvatrice.
Elle est tellement immense et intense qu’il ne sait plus s’il doit tenter de l’absorber ou se laisser absorber par elle.
Alors elle déborde, emplit mes poumons, rayonne dans ma gorge , emplit tout mon être d’une douce vibration, parfois joueuse, parfois plus solennelle, et toujours juste.
Puis elle s’arrête. Mais je la sens encore en moi, du moins pour un temps, jusqu’à ce que je me laisse distraire par autre chose.
Dans ma chance, mon cerveau, habituellement un peu rabat-joie ou tout au moins méfiant, s’est laissé toucher et attendrir par cette expérience. Lui qui a toujours quelque chose à dire ou à redire, s’est tût pour l’écouter. Il s’est senti apaisé, comme s’il avait compris quelque chose, comme s’il était rassuré.
Alors, un peu plus tard, quand je porterai mon attention sur lui, il me chantera cette merveilleuse mélodie, comme une réponse évidente à son anxiété et il emplira ainsi de nouveau mon cœur de cette chaleur.
Et mon cœur l’accueillera , d’autant plus maintenant qu’il s’est déjà ouvert une fois pour elle, et qu’il grandira et lui créera plus d’espace petit à petit, à chaque fois qu’elle s’offrira à lui.

Ego